Alexandrine - Troisième partie : Alexandrine et le pouvoir - Chapitre 10

Les yeux d’Alex ont soudain croisé un regard bleuté, elle s’est arrêtée et à dévisagé la personne à qui il appartient, un homme dans les vingt-sept, vingt-huit ans, pas très grand mais juste ce qu’il faut, mince, élégant, les cheveux presque roux et de là où elle est, Alexandrine distingue même quelques taches de rousseur.

Il s’approche d’ailleurs vers elle d’un pas décidé.

« Bonjour, je crois que vous êtes Mademoiselle Volkov, le président de la république française. »

« C’est exact mais je n’ai pas l’honneur de vous connaître. »

« Excusez-moi, je ne me suis pas présenté, Jérôme Mac Connely, ma mère est française, mon père écossais, je suis traducteur à l’ambassade d’Ecosse en France. »

« Que faites-vous en Angleterre ? »

« Je suis les ambassadeurs qui sont venus à ce sommet donner leur avis sur les problèmes du monde et surtout vous admirer. »

« Vous êtes un flatteur et cela fait longtemps que je n’écoute plus les flatteurs. »

« Ah oui et pourquoi donc ? »

« Parce qu’ils ne cherchent qu’une chose ou plutôt il y a deux cas, ceux qui veulent me mettre dans leur lit et ceux qui veulent m’influencer politiquement, seulement je ne couche pas avec n’importe qui et je ne suis pas politiquement influençable. »

« Très bien Mademoiselle Volkov mais je ne cherche ni l’un ni l’autre, je voulais simplement échanger quelques idées avec vous. »

« Dans ce cas nous pouvons discuter, d’ailleurs je dois vous avouer que cette réception m’ennuie, je croyais parler des problèmes mondiaux et de leurs solutions mais apparemment ici, on préfère rigoler et s’amuser. »

« C’est pour cela que sont faites les réceptions. »

« Lors des congrès officiels, elles sont faites pour essayer de répondre à des questions en commun et être ici en robe de soirée en train de boire du champagne me donne l’impression de mentir à mon pays. »

« Vous êtes trop idéaliste, Mademoiselle Volkov. »

« Vous trouvez ? C’est possible mais je ne changerais pas, je rêve d’un monde meilleur pour mes fils. »

« Vous avez des enfants ? C’est vrai ! Je l’ai lu quelque part. »

« J’ai trois fils, Ilya-Souleymane a sept ans, Gabriel-Isaac quatre ans et Viatcheslav aura deux ans en décembre, ce sont les êtres les plus importants de ma vie, avez-vous des enfants ? »

« Non pas d’enfant, pas de femme, pas même de fiancée, mes parents n’arrêtent pas de me sermonner, ils disent sans cesse qu’à vingt-huit ans, il serait grand temps de penser à fonder une famille, je suis bien d’accord avec eux mais je n’ai pas rencontré la femme de  ma vie. »

« Vous ne l’avez peut-être pas assez cherché ou vous êtes trop exigeant. »

« C’est possible mais ce n’est pas grave de toute façon, ça ne me gêne pas encore. »

« J’en suis heureuse pour vous, que diriez-vous de faire un tour dans le jardin, il fait chaud ici et tout ce brouhaha me fatigue. »

Disant ces mots, Alexandrine et Jérôme sortent de la pièce enfumée et vont prendre l’air à l’extérieur.

Alexandrine n’ose pas encore le lui dire mais le regard bleuté de ce Jérôme l’a secoué de frissons lorsqu’elle l’a croisé pourtant Alex s’était jurée de ne plus jamais croire en l’amour et c’est pour cela qu’elle se trouve bien embarrassée face à ce jeune homme. Elle se sent comme une jeune fille en émoi et se trouve ridicule, son esprit effleure la pensée de Djamel mais elle le chasse bien vite de son esprit pour se concentrer sur son interlocuteur.

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Alexandrine a serré ses fils contre elle avec bonheur après une semaine de voyage officiel, les retrouvailles sont toujours très agréables.

Ilya la noie de paroles, il lui raconte la rentrée qui a lieu avant-hier, sa nouvelle institutrice, ses camarades, la jolie Justine qui est toujours son amie, il parle aussi des taquineries incessantes des grands, dix ans à peine, qui ne cessent l’appeler en se moquant « Monsieur le fils de la présidente » mais il lui parle aussi de son école coranique et de ses progrès en arabe littéraire.

Ses yeux bleus s’illuminent merveilleusement quand il raconte et Alexandrine est fière de son fils aîné pourtant elle le fait taire et se penche sur Gabriel, le silencieux, lui pose des questions pour qu’à son tour il raconte l’école et ses camarades, le petit garçon hésite et se confie à demi-mot regardant sa mère avec son regard étrange et ponctuant ses phrases de silence pesant.

Viatcheslav, moins timide, tente d’attirer l’attention de sa mère et finit par y réussir babillant inintelligiblement un discours qu’il est le seul à comprendre.

Ils se dirigent tous les quatre vers la voiture où leur chauffeur les attend.

En moins d’une heure, ils arrivent à l’Elysée et Alexandrine décroche son téléphone pour appeler ses parents.

« Allo maman, c’est Alexandrine… Oui, je suis rentrée, mon avion a atterri il y a deux heures, les petits vont bien, j’ai été accueilli par de longs discours d’Ilya et de Viatcheslav, Gabriel a daigné me dire quelques mots, je sais bien qu’il n’est pas bavard… Olga va bien ?... Tu as des nouvelles de Nicolas ? Cela fait plus de deux mois que je ne l’ai pas vu, le petit Karol doit avoir bien grandi. »

« Il est magnifique Alex, si tu le voyais, blond, des prunelles joliment bleues et un visage très expressif, un vrai petit poupon, j’espère que nous serons tous réunis à Noël comme ça il pourra jouer avec tes fils. »

« Je vais organiser une grande fête pour Noël comme tous les ans et cette année, si cela ne te dérange pas, ce sera chez toi, je veux revivre les Noëls de mon enfance, au fait sait-tu que Florence est enceinte ? C’est pour l’année prochaine, en mars, je crois. »

« C’est une bonne nouvelle. »

« Par contre, je crois que cela va mal entre François et Aline, ils n’arrêtent pas de se disputer quand il prend Gabriel, je ne crois pas qu’il soit fait pour la vie à deux. »

« Et Coralie et Grégory ? »

« Une réussite maman, je crois qu’il y a là aussi du mariage dans l’air, je serais contente pour eux, j’aime voir mes amis heureux, d’ailleurs voilà bien longtemps que je n’ai pas vu Emilie et Sébastien. »

« Ils vont bien, ils sont venus nous voir la semaine dernière avec la petite Pauline, elle a encore grandi. »

« Parfait, bon je vais te laisser, il faut que j’aille travailler un peu. »

Alexandrine raccroche le combiné et va consulter ses conseillers les plus proches et en premier Djamel. Elle le regarde dans les yeux et s’écrie.

« Djamel, j’ai rencontré quelqu’un pendant mon voyage officiel et je crois que je suis amoureuse. »

Elle baisse les yeux, il tourne la tête et cache sa peine.

« Tu fais ce que tu veux Alex, tu ne m’appartiens pas, tu le sais bien, tu es libre d’aimer qui tu veux. »

« Je ne voudrais pas te faire de peine. »

« Trop tard c’est fait, tu m’as fait de la peine la première fois que tu m’as quitté alors qu’Ilya n’était qu’un bébé depuis je me méfie, tu es fidèle Alex mais seulement en amitié et moi je crois que je suis ton meilleur ami. »

« Tu l’es et tu le seras toujours. »

Alex se serre contre Djamel.

« Qui est-ce ? »

« Il s’appelle Jérôme, Jérôme Mac-Connely, il est franco-écossais, traducteur à l’ambassade d’Ecosse en France. »

« Tu vas vivre avec lui ? »

« Je ne crois pas, je ne veux plus vivre avec personne. »

« Tu es devenue méfiante et c’est cela qui est triste. »

Alex ne répond pas et se blottit contre lui.

« Parlons des affaires de l’Etat. »

« Ce sera mieux, tu as raison. »

En ce mois de septembre 1998, un an après les premières mesures mises en place par Alexandrine, le pays voit son économie se redresser.

Il n’y a plus que 500 000 chômeurs de comptabilisés, la croissance a repris sa course et le pays semble avoir retrouvé le sourire.

Alex, lors de ses rencontres officielles avec les autres chefs d’Etat tente maintenant de faire passer son idée de confédération et tout d’abord elle souhaiterait que la CEE se donne un président permanent et non pas tournant et qu’elle soit ce président.