Alexandrine - Cinquième partie : Confédération et retour aux sources - Chapitre 1

Alexandrine serre Coralie contre elle avec force et gaieté.

« C’est merveilleux Coralie, je suis si contente pour toi, le traitement a marché, tu es séronégative et tu attends un enfant, c’est le plus grand bonheur imaginable. »

« Je suis bien d’accord si on m’avait dit il y a encore deux ans que j’aurais un enfant, je ne l’aurais pas cru et maintenant il est là et je ne suis plus séropositive, tu aurais vu la joie de Grégory quand je le lui ai dit. »

« Mon Dieu Coralie il va y avoir un petit de plus lors de nos réunions. »

« Il ne reste plus maintenant qu’à espérer que Rebecca tombe enceinte. »

« Elle se désespère vraiment et leur demande d’adoption n’a pas encore aboutie. »

« Tu ne peux rien faire ? »

« Je ne suis pas partisane de ce genre de coup de pouce, je ne veux pas que l’on puisse dire que j’ai favorisé une amie. »

« C’est évidemment compliqué…Il faudra d’ailleurs que tu m’expliques comment on s’occupe d’un bébé. »

« Ce n’est pas nécessaire, cela vient tout seul, quand Ilya est né je ne savais pas comment faire et pourtant je crois que je me suis bien débrouillée avec mon fils. Regarde c’est le meilleur élève de sa classe et il va entrer en sixième, tu te souviens de notre entrée en sixième ? C’est ce jour-là que j’ai rencontré Djemila, elle avait l’air d’un petit oiseau perdu avec son tout petit visage et ses grands yeux de biche effarouchée, je suis allée vers elle sans savoir que j’allais vers mon destin. »

« Tu ne pouvais effectivement pas savoir que tu allais rencontrer son grand frère et que ce serait l’homme de ta vie, nous étions jalouses de toi, Emilie et moi parce qu’il y avait cet homme, c’était déjà un homme , si beau parce que Djamel est beau qui posait sur toi des yeux tellement plein d’amour, il y avait des gestes qui le trahissait et nous nous disions que ce n’était pas juste que cela t’arrive à toi avant nous, nous qui avions tout partagé…. Qui sait ce qui va arriver à Ilya le jour de son entrée en sixième ? »

« Rien, je l’espère, Ilya est un petit garçon. »

« Tu étais une petite fille quand tu as rencontré Djamel. »

« Arrêtes ! Tu vas me faire peur, mon fils ne rencontrera personne, je te dis, personne, il est trop jeune. »

« Qui est trop jeune ? » questionne Djamel en apparaissant.

« Ilya pour qu’il lui arrive quelque chose d’extraordinaire le jour de son entrée en sixième. »

« Bien sûr qu’il est trop jeune, il va seulement avoir onze ans, notre fils n’a pas l’âge de faire des rencontres. »

« Vous êtes pareils tous les deux, c’est la chair de votre chair mais vous savez un jour ou l’autre il partira et je ne voudrais pas vous inquiétez mais je crois qu’Ilya partira tôt. »

« Je sais Coralie, je le sens depuis longtemps mais je veux croire que pour l’instant, il a onze ans et il est là, c’est encore mon tout petit garçon pour quelques années, nous aurons bien le temps de songer à son départ quand il sera presque un homme. »

Alex souri à Djamel et Coralie sent son cœur se serrer en contemplant leur amour comme quand elle avait onze ans et qu’elle voulait être à la place d’Alexandrine même si maintenant l’amour est entré dans sa vie et qu’elle est heureuse et comblée.

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« Je porte un toast à la plus belle d’entre les belles, pour ses trente ans, nous t’aimons tous Alex » s’écrie François en levant son verre.

« A Alex ! » répète toute l’assemblée en chœur.

« Aux trois ans de Marie-Okhsana » complète Alexandrine, « vous oubliez cette pauvre petite. »

« Ce n’est pas grave maman » s’écrie la délicieuse petite fille aux longues boucles rousses en plongeant ses yeux dans ceux de sa mère.

« Tu es gentille mais ce n’est pas juste. »

« Trêve de discours » la coupe Arthur, « il y a des choses plus importantes, Florence et moi avons quelque chose à vous dire. »

« Je crois que je devine » murmure Alex.

« Nous ne voulons pas faire d’Audrey une fille unique alors nous avons mis en route un second bébé prévu pour le mois de mai. »

« Les grandes idées se rencontrent » s’écrie Sébastien, « le nôtre est pour avril. »

« Je suis très heureuse pour vous tous » s’exclame Alex,  « et d’abord pour Coralie qui est rayonnante. »

« Encore deux mois pour voir enfin cet enfant que j’attends depuis si longtemps. »

« Ilya pourquoi fais-tu cette tête ? » questionne Alex tournée vers son ainé.

« Pour rien seulement je serais toujours l'aîné et je vais encore me retrouver à surveiller toute cette marmaille. »

« Ce n’est pas vrai » intervient Pauline, « nous t’aidons avec Gabriel. »

« Si on veut. »

« Ilya, je te promets que tu ne surveilleras personne, arrêtes de faire cette tête, ce n’est pas gentil pour mon anniversaire. »

Ilya sourit et la table s’anime.

Olga est au bout avec d’un côté son fils Marc et de l’autre son petit-fils Nicolas, la vieille dame se voûte de plus en plus, on sent le poids des ans qui commence à se faire lourd.

Marc lui parle mais parfois elle perd un peu le fil de la conversation. Nicolas discute avec Natascha, son cabinet est maintenant installé et sa clientèle nombreuse et fidèle.

Arthur assis à côté de Florence discute de football avec Grégory qui est en face de lui tandis que Florence assomme Coralie de conseils pour le bébé à venir.

Rebecca est assise à côté de Victor et de Djemila avec laquelle elle a trouvé un sujet de conversation, la cuisine tandis que Victor discute avec Jérôme de leurs origines anglo-saxonnes.

Karim, le mari de Djemila découvre la religion juive avec François tandis que Djamel et Alex se remémorent quelques vieux souvenirs.

Ilya explique calmement à Pauline, blondinette de six ans, son entrée au collège en septembre. Il en est ravi, il s’y est fait beaucoup de nouveaux copains et ses professeurs sont unanimes pour le déclarer doué pour presque tout, les points faibles d’Ilya étant le dessin et la musique, disciplines accessoires pour lui.

Gabriel, huit ans, qui va au catéchisme depuis septembre et qui retourne également à la synagogue, explique à Farid, neuf ans, les différences entre l’islam et le judaïsme. L’enfant brun, fragile et sensible semble avoir trouvé une sorte d’équilibre au travers de la religion tandis qu’Ilya est parti vers d’autres sphères préférant actuellement augmenter ses connaissances en langues étrangères et sur les peuplades du monde entier.

Il dit en riant qu’il a fait le tour de Dieu et que désormais il veut connaître les hommes.

Viatcheslav, bientôt six ans, qui est entré en CP ne sais plus où donner de la tête coincé entre Fatima et Yasmina sept et cinq ans qui semblent avoir jeté leur dévolu sur lui depuis le début de la journée.

Il tente d’envoyer des messages désespérés à son cousin Karol, quatre ans mais celui-ci babille joyeusement avec Nadia, trois ans et demie et ne semble pas vouloir l’aider.

Audrey, trois ans et demie, Quentin, trois ans et Marie-Okhsana n’arrêtent pas de bavarder en jouant avec les cuillères et le pain.

La fille d’Alexandrine est désormais une jolie petite poupée aux longues boucles rousses et aux yeux couleur d’eau verte qui contemple le monde avec un regard plus que critique.

Enfin du haut de sa chaise, Olga bientôt deux ans regarde les adultes avec curiosité.

Le regard de la vieille Olga et le sien se sont croisés nouant comme un pacte secret d’amour et de continuité au travers des générations.