Alexandrine - Dixième partie : Une nouvelle voie - Chapitre 7

Alex regarde le soleil se lever en ce matin de novembre, aujourd’hui elle a cinquante ans et cela lui parait étrange d’avoir un demi-siècle.

Devant ses yeux, tant de choses défilent, son enfance heureuse en province avec ses parents, sa grand-mère et Nicolas puis la rencontre avec Djamel, le collège puis l’ascension vers le sommet de l’échelle, la présidence de l’organisation des nations confédérées.

Tout à l’heure, toute la famille sera là pour fêter son anniversaire mais pour l’instant, Alexandrine savoure le jour qui se lève, elle ne veut pas revenir en arrière, elle voudrait juste pour quelques instants avoir encore dix ans.

Une main se pose sur son épaule, elle se retourne, sourit à Djamel.

« C’est dur de vieillir, n’est-ce pas ? » murmure-t-il à son oreille.

« Un peu, ça fait drôle surtout, mon corps a cinquante ans mais mon âme, douze ans à peine, elle est restée telle qu’elle était quand je t’ai rencontré. »

« Je le sais, moi aussi j’aurais peut-être soixante ans l’an prochain mais dans mon cœur j’ai vingt ans pour toujours. »

« Djamel, j’aimerais que nous portions un toast de bonheur aux enfants aujourd’hui avec une petite pensée pour Marie, où qu’elle soit, cinq ans c’est long sans elle, elle me manque. »

« Nous le ferons. »

Il l’embrasse dans le cou tendrement et tandis que le jour se lève, Alex et Djamel partagent un instant d’éternité.

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Ilya sourit à sa mère pour atténuer sa déception.

« Je suis désolé maman, l’ONC ne m’intéresse pas. »

« D’accord mais qu’est-ce que je dois faire ? Rempiler pour six ans ou tout laisser tomber ? »

« Rempile pour six ans, tu ne peux pas laisser tomber l’ONC. »

« Tu as sans doute raison et puis dans six ans, je n’aurais même pas l’âge de la retraite. »

Elle sourit.

« Allons accueillir mes invités. »

Ilya sourit à sa jolie maman qui de blonde devient blanche mais dont le fin visage a bien résisté au temps, sa silhouette restant sans défaut.

Dans le salon, Djamel discute avec Caroline assise sur le canapé, la vieille dame de soixante et onze ans se lève en voyant sa fille et va l’embrasser.

« Bon anniversaire ma petite fille et merci pour tous les bonheurs que tu m’as donné. »

« J’ai bien été payé en retour. »

Elles s’embrassent chaleureusement tandis qu’Evguenia vient à son tour embrasser sa belle-mère.

Xénia tend des fleurs à sa grand-mère, elle est maintenant une jolie petite fille de neuf ans. Son frère Nicolas, six ans et demi a fait un dessin.

Svetlana apparait, la jeune fille de dix-sept ans traîne un jeune homme derrière elle.

« Tante Alexandrine, je te présente Philippe, mon petit ami. »

« Enchanté Philippe, ravie de vous connaître, Svetlana m’a tant parlé de vous. »

Le jeune homme lui serre la main, Alex trouve le couple qu’ils forment absolument charmant, Svetlana ressemblant de plus en plus à sa mère Natascha.

Gaby et Thomas font leur entrée, depuis deux ans leur vie a bien changé, le film de Gabriel a été un gros succès, il a ensuite enchaîné plusieurs longs métrages et une pièce de théâtre.

Le fils de la présidente est devenu un acteur célèbre, très bien payé et très demandé. Toutes les filles sont folles de ses yeux d’un vert incroyable et de son air vaguement oriental mais la seule fille dont Gaby est fou c’est la petite Myriam que Thomas tient dans ses bras, la fillette couleur d’ébène a désormais cinq ans.

Thomas est toujours avocat, ne voulant rien changer à sa vie au cas où le succès de Gaby cesserait, dans ce genre de métier on n’est jamais sûr de rien.

Ce sont Pauline et ses parents, Emilie et Sébastien qui arrivent maintenant suivis de Viatchi qui porte Abigaël, leur fille de vingt-deux mois.

Ils sont suivis de Quentin et Nadia qui vivent ensemble depuis plus de deux ans. Quentin est dans une école d’ingénieur et Nadia en maitrise de philosophie.

Djemila aussi est là au bras de Karim avec dans les bras son premier petit-fils, Martin, un an, le fils de Farid et Laeticia.

Fatima est accompagnée de son époux Iossef, elle est enceinte de quatre mois, sa sœur Yasmina âgée de vingt-cinq ans est par contre toujours célibataire. Leur jeune frère Sélim âgé de quinze ans lui sert de cavalier.

Alex aperçoit Karol qui semble heureux auprès de Céline qui tient à merveille son rôle de mère de substitution auprès de la jeune Aurore, huit ans.

Les amis d’Alex continuent d’arriver, Coralie et Grégory toujours aussi unis suivis de leurs deux enfants, Alexis beau jeune homme de dix-neuf ans étudiant en médecine et Eléonore, dix-sept ans lycéenne en classe de terminale.

Arthur et Florence sont accompagnés de leur fils Corentin qui prépare l’ENA comme ses parents autrefois.

Audrey, leur fille de vingt-trois ans est institutrice, elle est venue avec son mari Alain, un jeune directeur de marketing.

Marguerite, la jeune sœur de Pauline, déboule dans le salon en courant presque, accompagnée d’un jeune homme, Valentin qu’elle présente à tout le monde, elle a dix-neuf ans et a abandonné ses études pour le mannequinat, il est vrai qu’elle est grande, brune et très jolie.

Alex aperçoit Vladimir qui discute avec Caroline, il est heureux de vivre en France avec son fils et il est fou de la petite Abigaël qu’il gâte exagérément.

Jérôme est là aussi, discret, regardant Aurore comme un trésor.

Victor et Rebecca arrivent enfin traînant Samuel, dix-sept ans derrière eux, le jeune homme a l’air contrarié, Rebecca a refusé qu’il amène sa petite amie prétextant qu’ils étaient bien trop jeune pour les présentations officielles.

Alex cherche des yeux ses petits derniers, elle aperçoit enfin Camille qui devient une très jolie jeune fille en discussion avec Sélim.

Elle cherche Zachia et ne le voit pas, il est près de la fenêtre, il domine Xénia de sa haute taille, un mètre quatre-vingt à quatorze ans, elle semble l’écouter avec attention, Alex se demande ce qu’ils peuvent bien encore se raconter.

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Marie s’arrête sur le seuil de la maison, elle hésite, elle a vu toutes les voitures, elle se doutait bien qu’il y aurait une fête pour les cinquante ans de sa mère, elle a choisi d’y participer, elle sert fort la main d’Omar qui l’accompagne et qui porte dans ses bras leur enfant.

Elle est entrée, elle s’arrête et les observe un instant. Un cri s’élève de la bouche d’Ilya, il lui semble.

« Marie ! »

Marie a les yeux fixés sur sa mère, Alex se retourne, elle voit sa fille si semblable et si différente, elle se précipite vers elle et Marie se serre contre elle.

Elles sanglotent toutes les deux.

« C’est mon plus beau cadeau d’anniversaire, je suis si contente que tu sois là, Marie cinq ans, ça a été long. »

« Ça a été long pour moi aussi mais il le fallait, je me suis trouvée maman. »

Elles s’embrassent encore une fois.

« Aurore » s’écrie Alex, « Aurore, viens voir c’est ta maman. »

La fillette hésite détaillant l’arrivante qui lui tend les bras.

L’enfant se précipite soudain, Marie la serre très fort puis l’écarte pour la regarder.

« Comme tu es belle, quand je suis partie tu étais haute comme trois pommes, te voilà presque une jeune fille, comme tu es belle Aurore… Je te présente ton petit frère. »

Omar se penche pour mettre l’enfant au niveau de la fillette.

« Il s’appelle Ismaël, il a onze mois. »

Aurore le regarde et contre toute attente, embrasse le petit garçon couleur café au lait.

« Il est beau mon petit frère, il peut venir jouer avec moi et Xénia ? »

« Il est petit encore mais si tu y fais bien attention je te le confies. »

Aurore repart joyeuse avec son petit frère qui commence à peine à marcher, Marie présente Omar à Alex puis fait le tour de la famille découvrant les nouveaux visages.

Bien vite toutes les conversations reprennent, Alex ne cessant de fixer sa fille prodigue revenue après cinq ans d’absence, découvrant son nouveau gendre qui discute déjà avec Djamel qui revient ensuite vers Alexandrine.

« Il est très bien  le mari de ta fille, c’est un garçon intelligent, cultivé, Marie l’a bien choisie. »

« Ma fille a du gout et regarde-moi ce petit garçon, comme il est beau ! »

Alex ne peut s’empêcher d’aller le prendre dans ses bras, l’enfant la regarde avec de grands yeux étonnés. Elle le couvre de baisers et le petit Ismaël éclate de rire conquis par cette si jolie grand-mère.

Dans un coin près de la fenêtre, Zachia discute avec Xénia.

« Tu sais » déclare le grand adolescent, « je suis embêté de ne pas être plus vieux pour me présenter aux élections de l’ONC. »

« Tu verras ça dans six ans Zachia, tu auras vingt ans. »

« Crois-tu que je pourrais attendre jusque-là ? »

« Bien sûr. »

« J’ai peur d’être encore exclu du collège, mes déclarations hier dans la cour n’ont pas été appréciées par le principal. »

« C’est normal, ils ne comprennent rien mais un jour ils seront tous derrière toi. »

« Derrière nous Xénia, car toi tu crois en moi. »

« Je crois en ce que tu veux créer, ton idée est si belle, unir le matériel et le spirituel, donner une âme à l’ONC, le Dieu de Zakariyyâ-Ibrahim sera le plus fort. »

« C’est une évidence, je serais le spirituel et tu seras le matériel. »

« Si Dieu le veut qu’il en soit ainsi. »

Disant ses mots, Xénia met sa main dans celle de Zachia.

Ilya de loin essaie de suivre leur conciliabule et est surpris par le geste final.

« Qu’est-ce que vous complotez tous les deux ? » s’écrie-t-il en s’approchant.

Xénia sursaute mais Zachia réplique.

« Rien voyons Ilya, nous discutions. »

« De quoi ? »

« De choses et d’autres après tout j’ai bien le droit de discuter avec ta fille,  c’est ma nièce non ? »

« Bien sur Zachia. »

Il s’éloigne conscient d’avoir été ridicule mais il ne peut s’empêcher de se retourner et de surprendre deux regards soudés l’un à l’autre, comme aimantés, celui de son frère noir et ardent et celui de sa fille, bleu et brûlant.

Ilya se demande ce que tout cela va bien pouvoir donner.